•  

    Le déficit commercial algérien en net recul

     

    Le déficit commercial algérien a diminué de 68% en janvier par rapport à la même période l’an passé. Une tendance durable ?

    La courbe a fini par s’inverser. Pour la première fois depuis deux ans, le déficit commercial algérien, qui a atteint des niveaux record, passant sous la barre des 17 milliards de dollars, connaît une baisse significative.

    Selon les douanes algériennes, citées par l’APS (Algérie presse service), la balance commerciale a enregistré un déficit de 585 millions de dollars en janvier, alors qu’il était d’1,82 milliards de dollars à la même période en 2016. Soit un recul de 68% !

    L’Algérie est parvenue à redresser sa balance commerciale sous l’effet de la relance des cours du baril de pétrole. En effet, les exportations algériennes ont bondi de plus de 60%, passant de 2,05 milliards de dollars en janvier 2016 à 3,3 milliards de dollars au cours du premier mois de l’année. Cela correspond à une hausse de 1,25 milliard de dollars.

    Cette augmentation est le fait presque exclusivement des hydrocarbures, qui pèsent pour plus de 94% dans le total des exportations.

    « Le prix du pétrole est passé de 30 dollars le baril en janvier 2016 à 55 dollars le baril en janvier 2017. L’effet sur les exportations d’hydrocarbures est mécanique », estime Alexandre Kateb, consultant en économie auprès du gouvernement algérien. « Chaque variation d’un dollar du prix annuel moyen du baril de pétrole correspond à 600 millions de dollars de recettes annuelles en devises en plus ou en moins selon le sens de la variation », poursuit-il.

    Un résultat uniquement lié à la conjoncture ? 

    Tout laisse à penser que la baisse du déficit commercial algérien le mois passé est seulement « conjoncturelle ». « L’amélioration de la balance commerciale est le résultat direct de la réunion de l’OPEP à Alger où c’était amorcé le redressement des cours du pétrole », considère Mourad Ouchouchi, professeur d’économie à l’université de Béjaïa.

    Dans le même sens, Alexandre Kateb explique : « Cet effet de base, lié à l’écart des prix du pétrole devrait s’estomper au cours des prochains mois. Si on table sur un cours moyen à 55 dollars le baril en 2017, on devrait avoir des exportations d’hydrocarbures de l’ordre de 34 milliards de dollars.

    Tout dépendra donc de la capacité du gouvernement à comprimer les importations qui sont pour une part d’entre elles incompressibles (alimentation, médicaments, intrants divers pour l’industrie). La loi de finances 2017 a fortement fait baisser les dépenses d’équipement (-28%), ce qui se traduira par une baisse des importations associées à ces dépenses. »

    À ce propos, les autorités algériennes entendent poursuivre leurs efforts en matière de restriction des importations. Une réunion interministérielle s’est tenue le 19 février pour établir des quotas sur des produits concernés par les licences d’importation (automobile, ciment, fruits etc.). D’après une source au ministère du Commerce, une liste précise de quotas d’importation sera révélée d’ici quinze jours.


    votre commentaire
  •   

    Qui veut exploiter politiquement l’affaire de la journaliste algérienne blessée en Irak ?

    PAR - R. Mahmoudi 

    • L’ouverture de la frontière avec le Maroc «n’est pas à l’ordre du jour» (Abdelkader Messahel, Chaîne III)
    • Dernière minute : François Fillon revient sur sa décision de se retirer de la course à l'Elysée

     

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    La journaliste sur son lit d'hôpital. D. R.

    La polémique enfle depuis que la journaliste Samira Mouaki, blessée par balle en Irak le 13 février dernier, et se trouvant toujours hospitalisée à Bagdad, a fait une déclaration dans laquelle elle aurait annoncé sa reconversion au chiisme et qu’elle n’aimerait plus revenir au pays. Quelle est la part de vérité et de manipulation dans cette histoire ? Difficile à savoir pour l’instant. Ce qu’on sait c’est que des journalistes algériens ont adressé un appel urgent aux autorités algériennes et irakiennes pour exiger une meilleure prise en charge médicale et psychologique de leur consœur, et interdire tout reportage sur elle, parce qu’ils jugent qu’elle n’a pas toutes ses facultés mentales et que, par conséquent, des personnes «malintentionnées» pourraient exploiter ses propos.  

    «La famille de notre consœur, représentée par ses deux frères qui lui ont rendu visite à Bagdad, lit-on dans la lettre-pétition, affirment que la blessure qu’elle a subie lors de sa couverture de la guerre en Irak a dû laisser des séquelles profonde sur sa santé, et des troubles psychologiques manifestes qui lui ôtent toute responsabilité sur certains propos qui lui sont attribués».

    Ces journalistes demandent alors expressément l’intervention des autorités irakiennes pour «empêcher toute exploitation» de la journaliste blessée par des personnes, que les auteurs de l’appel de définissent pas, dans des reportages qui alimentent des polémiques publiés dans les réseaux sociaux et dans d’autres, «en totale contradiction avec la loi et la conscience professionnelle». Ils exhortent par la même occasion le corps médical et la famille des journalistes irakiens à agir en urgence pour arrêter cette «mascarade».

    Les auteurs de l’appel-pétition accusent implicitement des chiites irakiens de vouloir faire dans la récupération politique, mais il n’est pas à exclure que ces pétitionnaires eux-mêmes cherchent à exploiter l’événement pour attiser cette haine confessionnelle devenu le leitmotiv d’un courant politique qui relaie mécaniquement le discours dominant dans les pays du Golfe, qui eux sont en guerre avec l’Iran qu’ils accusent de visées expansionnistes dans la région.    

    Pour rappel, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a déjà démenti, jeudi dernier, les informations alarmistes publiées sur les réseaux sociaux et certains médias électroniques étrangers au sujet de l’état de santé de la journaliste. Il a, par ailleurs, indiqué que les services du ministère des Affaires étrangères étaient en contact permanent avec l’ambassadeur algérien à Bagdad qui lui a rendu visite, à deux reprises, en précisant que l’équipe médicale spécialisée irakienne en charge du suivi de la patiente algérienne était optimiste quant à l’évolution positive de son état de santé.

     

     


    votre commentaire
  •  

    Polémique sur le retrait de candidature des ministres: Flou artistique du FLN 

    Mercredi 1 mars 2017 à 9:52 

    Source de l'article :    

     

     

    Ces renoncements sans raison apparente n’ont été ni confirmés ni infirmés par les dirigeants du parti. 

    Alors que le secrétaire général du FLN, Djamel Oued Abbés dément qu’il y ait retrait de candidatures des ministres, la presse insiste sur le renoncement annoncé par au moins quatre ministres de l’actuel gouvernement, qui devaient conduire les listes du FLN aux élections législatives du 4 mai prochain. Un flou artistique entoure cette polémique. Ainsi, des ministres dont les noms ont été annoncés solennellement pour piloter des listes FLN aux législatives, dans différentes wilayas, auraient renoncé, en fin de compte, à se porter candidats à la députation. 

    Cette information rapportée par plusieurs organes de la presse nationale, en citant des sources au sein de la direction du parti, n’a été ni confirmée ni infirmée par les dirigeants du parti. Les raisons de ces retraits en cascade restent «insondables». «Ces ministres préfèrent garder leurs postes, se contente-t-on d’ indiquer. 

    Parmi eux, on cite le ministre des Transports, Boudjema Talaï, le ministre des Ressources en eau et de l’Environnement, Abdelkader Ouali, le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Abdesslam Chelgham. Ces derniers emboîtent le pas au ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Abdelmalek Boudiaf qui avait déjà annoncé sa décision de ne pas se porter candidat aux législatives. 

    Interrogé à ce propos, Ould Abbès a indiqué lors d’une conférence de presse tenue dimanche dernier que «les ministres issus du parti en lice pour les prochaines élections législatives n’ont pas retiré leurs candidatures». Il avait toutefois affirmé qu’ «il n’a jamais obligé les ministres à se porter candidats sur les listes du parti». «Je n’ai jamais abordé la question des législatives avec Abdelmalek Boudiaf», a-t-il fait remarquer. «Le seul ministre auquel j’ai proposé d’y participer était le ministre de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville, Abdelmadjid Tebboune. Ce dernier ne pouvait pas se présenter car il assume des charges importantes au sein du gouvernement, comme la prise en charge du chantier de la Grande mosquée d’ Alger et assure l’intérim de ministre du Commerce», avait-il aussi fait savoir. «Outre les noms sus-indiqués, d’autres ministres seraient sur le point de surseoir à leurs candidatures», selon certaines sources. Ould Abbès a reporté l’affichage des listes du FLN jusqu’au 6 mars prochain. 

    Pour rappel, le secrétaire général du FLN avait confirmé à l’hôtel Moncada à Ben Aknoun(Alger), que huit ministres du gouvernement actuel seront candidats à la députation sur les listes du FLN. Il s’agit de Abdelkader Ouali, Tahar Hadjar, Ghania Eddalia, Boudjema Talaï, Abdelmalek Boudiaf, Abdesslam Chelgham, Abdelwahab Nouri et Aïcha Tagabou. Par ailleurs, le patron du FLN a relevé qu’en cas de victoire lors des prochaines législatives, le poste du président de l’APN ne sera pas forcément occupé par le tête de liste du parti de la wilaya d’Alger. 

    A une question sur l’existence d’un comité restreint composé de conseillers à la présidence de la République et de membres du bureau politique du parti, il a précisé que la commission nationale élargie est «seule responsable de l’élaboration des listes électorales du parti».Il a rappelé, dans ce cadre, que la commission avait examiné 6 228 dossiers dont plus de 600 dossiers concernent la wilaya d’Alger avec 115 candidatures de femmes. Quant aux informations rapportées par certains médias sur la santé du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, il a affirmé que le Président «va bien et poursuit ses activités normalement».


    votre commentaire
  •              Retirez-vous en paix monsieur Bouteflika  

    Nos chroniqueurs, Politique,  

    Monsieur Le Président, 

    Permettez-moi tout d’abord de prendre de vos nouvelles, d’espérer que vous allez mieux et de vous souhaiter un prompt rétablissement. Il ne s’agit ni d’un exercice convenu ni d’un préalable à une quelconque demande mais bien de l’expression d’une compassion et d’une empathie que chacun de nous éprouve à l’égard de son semblable lorsqu’il traverse des moments aussi pénibles dus à une mauvaise santé.

    Croyez monsieur le Président, qu’à l’instar du peuple algérien dans sa totalité, je prie Dieu de vous épargner la douleur et la tristesse et de vous assister avec la plus grande bienveillance dans la pénible épreuve du passage, inévitable pour nous tous du reste, vers l’autre rive.

    Seuls les plus sages d’entre nous s’y préparent avec la plus grande des sérénités. Je ne doute pas que vous en soyez, eu égard à votre érudition à votre culture et à votre conversion, fut-elle tardivement révélée, à la spiritualité islamique et à l’ambiance feutrée des zaouïas, nous dit-on.

    Connaissant l’intensité de votre foi en Dieu et en sa miséricorde et la profondeur de votre réflexion sur la fragilité de notre passage en ce bas monde, je mesure la sérénité qui ne vous quitte jamais lorsque vous sentez approcher par les moments de fatigue et de lassitude, le moment qui vous rapproche de la rencontre du Créateur. On dit que dans ces moments rares, on voit défiler en mode accéléré les moments importants de sa vie et on souhaite alors seulement que les ralentis évitent nos moments de turpitude, de faiblesse et d’abandon à ce qu’il y a de plus mauvais de nous en nous.

    Comme à vous demander par exemple, monsieur le Président, s’il est vraiment raisonnable et utile de s’accrocher désespérément aux derniers oripeaux du Pouvoir ou de ce qu’il représente, aux seules fins de satisfaire on ne sait quel dernier soubresaut de narcissisme crépusculaire. Sans la moindre pensée pour toute une jeunesse qui n’arrête pas de piaffer et qui souffre d’être contrainte de se demander s’il fallait souhaiter votre mort – qu’à Dieu ne plaise- pour exprimer enfin son talent ou pour tout simplement exister.

    Les trois-quarts de vos administrés sont des jeunes et ils ne peuvent se résoudre à se considérer hors-jeu alors qu’ils n’ont encore jamais eu l’occasion de tenter, au prétexte que les anciens jouent les prolongations, qu’il n’y a pas d’arbitre, que les règles ont évolué et que les spectateurs sont grassement payés pour assister aux mimiques aux jeux de rôles et au bal masqué. Que faut-il leur répondre ?

    Que la maladie vous a tellement affaibli que vous souffrez plus de ne pas dialoguer directement avec votre peuple que des douleurs récurrentes de la maladie ?

    Que vous comprenez les besoins et les envies de cette jeunesse qui ne demande qu’à se construire et à construire le pays, et que vous ne pouvez rien faire pour elle parce que vous avez perdu l’usage de la parole ? Fort bien !

    Qu’attendez-vous alors, monsieur le Président pour éloigner toutes ces silhouettes parasites, qui parlent pour vous, qui décident pour vous ? Qui prétextent une bronchite fulgurante au mépris des normes de la faculté pour faire rebrousser chemin au partenaire allemand, qui a eu le courage de braver les interdits français pour apporter la preuve que la coopération de l’Allemagne n’était pas réservée exclusivement à l’ancienne Europe de l’Est, et qui n’avait plus à faire la preuve de son respect des valeurs humanistes en réservant l’accueil que l’on sait aux réfugiés. L’Allemagne venait d’étonner le monde et de donner de la France patrie des droits de l’homme, l’image d’un pays rabougri, replié sur lui-même, et soucieux de ne pas trop contrarier la relève fasciste.

    Nous avons accueilli Manuel Valls et nous avons bien apprécié le cadeau qu’il nous a envoyé en guise de remerciements. Mais nous avons reporté la visite de la chancelière allemande au prétexte d’une bronchite fulgurante, alors qu’elle était venue finaliser tant de projets nous dit-on qui auguraient d’un avenir plus engageant.

    Faut-il que le développement d’un pays et son accès au progrès soient tributaires d’une quinte de toux, d’un mauvais virus ou d’une saute d’humeur ?

    Faut-il penser qu’un pays de quarante millions d’habitants n’ait pas réussi à trouver une seule personne capable de remplacer l’irremplaçable en cas de bronchite ? Un premier ministre de circonstance, capable de jouer les utilités pour faire bonne figure et nous éviter les sarcasmes.

    On nous dit, monsieur Le Président que, non seulement vous êtes en possession de tous vos moyens intellectuels mais qu’en plus, vous avez tellement envie de prendre votre part au devenir du monde, que vous souhaitez un cinquième mandat présidentiel. Serait-il alors irrespectueux de vous suggérer de convaincre la faculté pour être sûr de convaincre tout le pays. Les Algériens croient comme tout le monde à la science. Il leur arrive même de croire au miracle tant qu’il ne ressemble pas à de l’entourloupe et tant qu’ils ne passent pas pour des idiots.

    Car au fond, et cela dure depuis des années, on leur demande de s’habituer au langage des signes, des courroies de transmission, des porte-parole, des proches, des amis du frère, des proches des amis du frère, des bruits du palais, des rumeurs des coursives, des murmures des cénacles et des chuchotements des zaouïas et dès qu’ils demandent à voir et à comprendre ils sont éconduits avec plus ou moins de brutalité, selon le niveau de la douleur et l’humeur du moment.

    Ils sont devenus un peuple otage, qui ne sait plus quoi attendre, qui ne sait plus à quelle sauce il va être mangé, qui attend le moindre éternuement, le moindre signe pour se perdre aussitôt en spéculations.

    Quarante millions d’âmes sont suspendues à un thermomètre, à un froncement de sourcil, à la profondeur d’un regard pour savoir si demain il y aura ou non pénurie de médicaments contre le diabète, grève au lycée, tricherie au bac, ou qualification aux quart de finale de la CAF.

    Alors monsieur le Président, il faudra bien que vous sachiez que notre jeunesse est comme toutes les autres jeunesses du monde.

    Qu’elle veut se construire et prendre sa part à la construction du monde.

    Qu’elle se fiche comme d’une guigne de savoir qui a pris quoi et combien.

    Que la seule chose qui l’intéresse c’est de prendre son destin en main.

    Alors, elle vous dit : retirez-vous sur votre Aventin, prenez de la hauteur pour mieux apprécier l’œuvre accompli, entourez-vous de ceux qui sont fatigués de vous avoir aidé à accomplir tant de miracles et qui ne demandent qu’à se reposer, et profitez ensemble du repos mérité.

    Retirez-vous en paix monsieur le Président. Nous prierons nuit et jour pour votre santé et pour que le ridicule ne vienne pas achever tout un peuple.

    Croyez monsieur le Président à ma plus grande sincérité et à tout le respect que je dois à l’homme, à la fonction et à l’image qu’il est sensé incarner. 


    votre commentaire
  •  Algérie : comment les généraux ont écarté Chadli et plongé le pays dans l’inconnu 

      

    Source de l'article    

      

     

                                                                                                                                                                                                                                                                               En janvier 1992, pour barrer la route au FIS, l’armée décide d’interrompre le processus électoral et de pousser le président vers la sortie. Histoire secrète d’un « putsch », véritable révolution de palais, qui précipitera le pays dans la guerre civile. 

    Costume sombre, assis les jambes croisées sur un canapé beige, Chadli Bendjedid tend une chemise cartonnée au président du Conseil constitutionnel qui, les mains tremblantes, peine à cacher son malaise. À l’intérieur de la chemise, sa lettre de démission. La caméra zoome sur le paraphe présidentiel, comme pour lever toute équivoque. Chadli marmonne quelques mots, se lève et salue les membres du Conseil. « Vous avez beaucoup de travail, glisse-t-il, je vous libère. Au revoir. » Il tourne les talons et quitte la pièce.

    Sans même s’adresser à ses compatriotes, le président Chadli Bendjedid abandonne ses fonctions dix-sept jours après le premier tour des élections législatives du 26 décembre 1991, largement remportées par le Front islamique du salut (FIS). Nous sommes le samedi 11 janvier 1992. Il est 20 h 30. L’Algérie vient de plonger dans l’inconnu.

    Vingt-quatre ans après ce fameux samedi soir, les circonstances qui ont entouré le départ de Bendjedid, mort en 2012, emportant avec lui ses secrets, continuent de nourrir diverses exégèses. Démission volontaire, coup d’État, retraite forcée ou « putsch » sur canapé, ces dix-sept jours de bruit et de fureur qui ont bouleversé l’Algérie, et même ses voisins maghrébins, l’Europe et le Moyen-Orient, sont encore entourés de mystères, de non-dits, d’approximations ou de demi- ou contrevérités. La polémique qui fait rage dans les médias locaux en ce mois de fevrier 2017autour de cette période de l’Histoire illustre à quel point celle-ci divise encore les Algériens, a fortiori ceux qui l’ont écrite.

    Sur la dizaine de militaires et de civils qui étaient au cœur de ce tsunami politique, une bonne moitié n’est plus de ce monde. Parmi les survivants, certains ont accepté, sous le sceau de l’anonymat, de lever un coin du voile sur les derniers secrets entourant cet épisode qui fera basculer le pays dans la guerre civile, laquelle se soldera par plus de 150 000 victimes, des dizaines de milliers de disparus, un million de déplacés, et poussera à l’exil une bonne partie de l’intelligentsia algérienne.

    Une cohabitation avec le FIS ? 

    Le compte à rebours avait commencé le 24 décembre, deux jours avant le premier tour des législatives. Le président rencontre la presse. Une question fuse : « Que feriez-vous si le FIS obtenait la majorité au Parlement ? » Chadli : « Le gouvernement est responsable devant l’Assemblée et non devant le président. » Comprendre : il est prêt à cohabiter avec les islamistes, qui promettent d’instaurer un califat islamique. Coup de sang chez certains généraux. « Inadmissible et inacceptable, s’emporte l’un de ceux qui œuvreront à la démission de Chadli. On sent qu’il ne mesure pas les dangers qu’il fait courir au pays. »

    Partager le pouvoir avec les islamistes alors que l’armée venait à peine d’enterrer cinq soldats, tués et émasculés lors de l’attaque du poste frontalier de Guemar, dans le sud-ouest du pays, par un groupe d’« Afghans » dirigé par un maire membre du FIS ? Cohabiter avec un parti dont les deux principaux dirigeants, Abassi Madani et Ali Belhadj, purgent une peine de douze ans de prison pour « complot contre l’autorité de l’État, sabotage économique et distribution de tracts de nature à nuire à l’intérêt national » ? Confier les affaires du pays à Abdelkader Hachani, numéro trois du FIS, qui promet « le califat islamique ou la mort », ou encore à Mohammedi Saïd, officier SS durant la Seconde Guerre mondiale, qui se dit prêt « à liquider deux millions de ses habitants pour assainir le pays » ?

    Non, décidément, les propos de Chadli Bendjedid restent en travers de la gorge des militaires. À peine sa conférence de presse terminée, un groupe de hauts gradés – Khaled Nezzar (ministre de la Défense), Abdelmadjid Taghit (commandant de la marine nationale), Mohamed Touati (conseiller au ministère de la Défense) et Mohamed Lamari (commandant des forces terrestres) – multiplient les échanges et les concertations dans des villas d’Alger ou au siège du ministère de la Défense. Objectif : barrer la route du pouvoir aux islamistes.

    Jeudi 26 décembre, premier tour du scrutin. Raz-de-marée du FIS. Avec 3,2 millions de voix sur 13 millions d’électeurs, il rafle 188 des 430 sièges de l’Assemblée populaire nationale (APN). Le Front des forces socialistes (FFS) de Hocine Aït Ahmed en obtient 25, alors que le FLN, l’ex-parti unique, se contente de 16. Les autres partis ? Totalement laminés. En ballottage favorable dans plus de 140 circonscriptions, le FIS, qui contrôle déjà 853 mairies sur 1 539 depuis les communales de juin 1990, est en passe d’arracher la majorité absolue au Parlement. Les islamistes jubilent et les démocrates sont atterrés. L’Europe redoute l’avènement d’un État islamique à ses portes et l’afflux de centaines de milliers de réfugiés. À Alger, le désarroi traverse toutes les strates du pouvoir.

    Vendredi 27 décembre, réunion au palais du gouvernement. Autour du Premier ministre, Sid Ahmed Ghozali, du ministre de la Défense et de celui de l’Intérieur, le général Larbi Belkheir, les mines sont défaites. Les résultats ne sont pas encore définitifs, mais tout le monde mesure l’ampleur de la débâcle et redoute l’issue du second tour, prévu le 16 janvier. Faut-il le maintenir ou l’annuler ? Le premier contact avec le président se passe mal. Samedi 28 décembre, il reçoit le ministre de la Défense dans sa résidence d’État, à Zeralda. L’ambiance est sinistre. Chadli est en état de choc. Nezzar : « Monsieur le président, nous vous avions averti. Voilà où nous en sommes maintenant. » Incapable de réfléchir, le chef de l’État abrège la discussion. « Revoyons-nous dans deux ou trois jours », dit-il au patron de l’armée. Dans l’après-midi même, le ministre de la Communication, Aboubakr Belkaid, réunit les directeurs de journaux au Palais de la culture, sur les hauteurs d’Alger.

    Le 29 décembre, Abdelkader Hachani affirme que son parti est prêt à cohabiter avec le président Chadli

    Les échanges sont vifs, et la crainte de voir les islamistes accéder au pouvoir plane sur le conclave. Comment faire ? Belkaid demande aux journalistes d’insister sur le projet de société rétrograde du FIS et sur les déclarations de ses dirigeants, qui veulent remettre en question les acquis démocratiques nés de la révolte d’octobre 1988. « Le reste, on s’en charge », rassure le ministre. Au sortir de la réunion, beaucoup comprennent que quelque chose de grave se trame en haut lieu. Le FIS, lui, met la pression. Le 29 décembre, Abdelkader Hachani affirme que son parti est prêt à cohabiter avec le président Chadli. Toutefois, précise-t-il, il exigera « une élection présidentielle anticipée au cas où l’Assemblée [serait] délestée de ses prérogatives ». De quoi effrayer encore davantage le commandement de l’armée.

    La réaction de l’establishment militaire 

    Après des échanges intensifs entre officiers supérieurs, l’establishment militaire décide de se réunir au siège du commandement des forces terrestres, à Aïn Naadja, dès le 30 décembre. Tous les directeurs centraux du ministère de la Défense, les responsables des services de renseignements, ainsi que les commandants des régions sont présents. La réunion est présidée par Khaled Nezzar, Abbas Gheziel, patron de la gendarmerie nationale, et Abdelmalek Guenaïzia, chef d’état-major. Pendant trois heures, sans ordre du jour précis, tous les participants prennent la parole, sauf Mohamed Mediène, dit Toufik, chef du Département du renseignement et de la sécurité (DRS). « Il fallait convaincre le président de se rendre à l’évidence : la situation était tellement grave qu’elle pouvait le conduire à trancher des questions délicates, raconte un général qui a pris part au conclave.

    Le président pouvait-il gouverner avec le FIS alors que l’armée s’y opposait ? Si jamais le FIS avait accédé au pouvoir, l’institution militaire se serait scindée en plusieurs factions, avec des conséquences incalculables sur sa cohésion et sur la sécurité du pays. Était-il envisageable que le président renonce à son mandat de son propre chef ? Fallait-il le démettre ? Nous devions aider Chadli à trouver une solution, d’autant que l’arrivée au pouvoir des islamistes aurait eu des répercussions géostratégiques au Maghreb et au-delà. »

    Sur la quarantaine d’officiers, quatre seulement émettent des réserves sur l’arrêt du processus électoral, notamment deux chefs de région. Les autres acquiescent. Khaled Nezzar demande à ses pairs de constituer un groupe restreint en qui Chadli a confiance. Nezzar, Guenaïzia, Dib Makhlouf, commandant de la garde républicaine, et Ahmed Djenouhat, chef de la Ire région militaire, forment ce « comité de sages ». Sa mission consiste à transmettre au président le message suivant : l’armée récuse la tenue du second tour.

    Dans la nuit du 5 janvier, Mehri rencontre secrètement Abdelkader Hachani dans une villa du Club des pins, station balnéaire à l’ouest d’Alger

    Le comité rencontre le président, mais celui-ci réserve sa décision. Indécis, hésitant, il subit de multiples pressions. Son entourage souhaite qu’il aille jusqu’au bout de son mandat. Le patron du FLN, Abdelhamid Mehri, gendre de Chadli, veut la poursuite du processus électoral. Dans la nuit du 5 janvier, Mehri rencontre secrètement Abdelkader Hachani dans une villa du Club des pins, station balnéaire à l’ouest d’Alger. Hachani lui demande de faire passer un message au président de la République. Le FIS, explique-t-il, se contenterait de ses 188 sièges.

    Au second tour, il appellerait à voter en faveur du FLN. Il renoncerait au poste de chef du gouvernement au profit de Hocine Aït Ahmed, président du FFS. Enfin, il ne réclamerait que trois postes ministériels, à savoir la Justice, l’Éducation nationale et les Affaires sociales. Le message a-t-il été transmis ? Chadli a-t-il tenté, via Mehri, de conclure un deal avec le FIS en proposant une élection présidentielle anticipée en lieu et place du second tour ? Ou bien a-t-il botté en touche face aux propositions de Hachani ? Les trois protagonistes n’étant plus de ce monde, on ne saura sans doute jamais toute la vérité sur ces tractations.

    La démission du président 

    En attendant la réponse du président, des renforts militaires sont discrètement acheminés vers la capitale pour y être déployés en cas d’éventuels débordements. Un autre scénario a-t-il été envisagé si d’aventure Chadli venait à s’opposer à la recommandation de la Grande Muette de mettre un terme au processus électoral ? Confié à Mohamed Lamari, commandant des forces terrestres, un plan B secret est dans les tuyaux. « Heureusement, nous n’avons jamais eu à le mettre à exécution », révèle un haut gradé. C’est qu’après plusieurs jours de tergiversations, le président rencontre une troisième fois le ministre de la Défense, le jeudi 9 janvier. Il confie à Nezzar : « Encore une fois, c’est à l’armée de trouver des solutions. » Il demande qu’on lui prépare une lettre de démission. Sauf qu’il reste un détail et non des moindres. Pour entériner le changement, il faut dissoudre l’actuel Parlement.

    C’est que l’article 84 de la Constitution dispose que le président de l’Assemblée en exercice, Abdelaziz Belkhadem, lequel n’a jamais fait mystère de ses sympathies pour le projet islamiste, assume l’intérim du chef de l’État démissionnaire pour une période de quarante-cinq jours avant la tenue de la présidentielle anticipée. « Pour nous, il était exclu que Belkhadem assume cet intérim, soutient aujourd’hui un officier de haut rang. Nos services de renseignements détenaient des enregistrements compromettants entre lui et des agents iraniens accrédités à Alger. » Les militaires suggèrent donc, via le secrétaire général de la présidence, de dissoudre l’Assemblée. Le président signe le décret.

    Le 11 janvier, à 20 h 30, il tourne le dos au pouvoir Chadli ayant donné son accord pour quitter ses fonctions, Nezzar charge aussitôt les généraux Mohamed Touati et Abdelmadjid Taghit, ainsi que les deux ministres, Belkaid et Ali Haroun, de rédiger la lettre de démission. Au domicile de ce dernier, les quatre hommes mettent trois heures à la peaufiner. « Il ne fallait pas que celle-ci donne de lui l’image d’un président affaibli ou d’un homme sous la contrainte, raconte l’un des rédacteurs. Chadli a fait passer l’intérêt du pays avant le sien. C’était tout à son honneur. Nous étions sûrs à 90 % qu’il allait partir sans être forcé. »

    Dans l’après-midi même, la lettre parvient au chef de l’État, qui la fait lire à ses conseillers avant de donner sa réponse. « C’est bon, dit-il. J’accepte le contenu tel quel. » Son départ sera annoncé officiellement le samedi 11 janvier.

    Mais l’affaire est loin d’être conclue car le chef de l’État refuse de s’exprimer publiquement sur son départ. Les militaires insistent pour qu’il apparaisse devant les caméras de la télévision nationale afin de lever toute ambiguïté. Une démission sans apparition publique serait assimilée à un coup d’État. Après deux jours d’hésitation, Chadli Bendjedid accepte de faire une brève apparition télévisée. Le 11 janvier, à 20 h 30, il tourne le dos au pouvoir.

    UN RAPPORT PRÉMONITOIRE 

    C ‘ est un document d’une quinzaine de pages classé « secret ». Peu de temps avant les communales de juin 1990 remportées par le FIS, trois généraux élaborent un rapport secret sur la mouvance islamiste en Algérie. Les auteurs mettent en garde contre le danger de ce courant qui pourrait déboucher sur des violences. Pour contrer l’ascension irrésistible du FIS, ils proposent de mettre en place une coalition entre le FLN et les deux partis laïques, le Front des forces socialistes (FFS) et le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD). Ils recommandent également une plus grande ouverture en direction des associations démocratiques et de la société civile.

    Quand il reçoit le rapport, via Khaled Nezzar, le président Chadli n’y donne aucune suite. Mais à l’automne 1990, ce dernier accepte de rencontrer une vingtaine d’officiers de haut rang aux Tagarins, siège du ministère de la Défense, dans le quartier d’El-Biar. « Il y a des gens qui ont peur, dit le président. Nous irons jusqu’au bout du processus. Les islamistes s’agitent mais ils n’arriveront pas à leur fin. N’ayez crainte, hna chadine rass lehbel [« nous maîtrisons la situation »]. » Personne ne prend la parole pour répondre au chef de l’État, mais bon nombre de généraux sont sceptiques. Une année plus tard, leurs craintes se révéleront fondées.

     


    votre commentaire